Certains fidèles s’en étaient apperçu (et ému), mais mon blog a été bel et bien été effacé. Après quelques semaines de tractations intenses avec des interlocuteurs relativement incompétents, j’ai toutefois réussi à faire restaurer l’ancien contenu sur une nouvelle plateforme… malheureusement les images se sont perdues en cour de route et la nouvelle interface est beaucoup moins sympas que la précédente.

Je ne vous cache pas que l’idée de tout abandonner m’a traversée l’esprit. Mais je me suis souvenu des premiers vers de ce poème de Kippling, “SI”:

Si tu peux voir détruire l’ouvrage de ta vie

Et sans dire un seul mot te mettre à rebâtir

[…]

Tu seras un homme, mon fils.

Donc voila… un nouveau concept est à l’étude pour la saison prochaine et, en attendant, le récit en images et en chiffres de notre raid dans l’Oberland est à présent disponible… ci-dessous !!!

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L’Oberland est un massif situé à peu près au centre de la Suisse, au Sud-Est de Berne. On y accède le plus facilement depuis la petite ville d’Interlaken grâce à un réseau de trains à crémaillère particulièrement performant.

A proximité on trouve quelques prestigieuses stations de ski comme Wengen et Grindelwald.

C’est un massif élevé où l’on évolue presque tout le temps entre 3000m et 4000m d’altitude. Au moins 7 sommets culminent à plus de 4000 et certains font partie des must pour tout alpiniste qui se respecte: Eiger, Mönch, Jungfrau, Altetschhorn, Finsteraarhorn.

Les glaciers qui s’en épanchent sont sans doute les plus gros d’Europe occidentale.

Notre parcours s’est finalement déroulé sur 6 jours en empruntant l’itinéraire suivant:

  (Ronds rouges = Refuges / Triangles rouges = Sommets)

29/04: Trajet en voiture+train >>> Mönchjochhütte via le “Louwihorn”
30/04: Mönchjochhütte >>> Finsteraarhornhütte via le “Gross-Fiescherhorn”
01/05: A/R au “Finsteraarhorn” depuis Finsteraarhornhütte
02/05: Finsteraarhornhütte >>> Konkordiahütte via le “Wyssnollen”
03/05: A/R au “Klein-Grünhorn” depuis Konkordiahütte
04/05: Konkordiahütte >>> Blatten via Hollandiahütte + retour

Pour faire face à tout ça, on peut dire que nous étions venus en force… à 12 (Caro, Christelle, François, Fifi, Hughes, JC, Jean-François, Marc, Michel, Micka, Sergio et votre serviteur), plus le Guide.

(merci à Marc pour ce montage, un peu kitch, mais bien foutu. Attention il y a un petit indice qui permet facilement de déceller la supercherie).

29/04/07

Départ: Jungfraujoch ~ 11h00
Arrivée: Mönchjochhütte ~ 16h30
Sommet: Louwihorn (3773m) - 13h49

Asc.: 852m @ 250m/h
Dsc.: 621m @ 1550m/h
Tps: 5h24

Le Dimanche 29 Mai à 08h04, le groupe se constitue sur le quai de la gare d’Interlaken. Certains arrivent par le train qu’ils ont pris un peu plus tôt à Goppenstein, les autres en voiture depuis Annemasse.

On commence par 2h de tourisme, parmis les touristes, en prenant le train qui nous monte jusqu’au Jungfraujoch (col de la Jungfrau).

Au début c’est un train à crémaillère suisse, panoramique mais "classique".

Nous empruntons la branche qui passe par la station de Grindelwald. Tout au long de la montée nous avons une vue sur l’impressionnante et célèbre face nord de l’Eiger.

L’autre branche, que nous avions pris il y a 5ans, passe par la station de Wengen en cheminant le long de la fameuse piste de Descente de Coupe du Monde.

La jonction des deux se fait à Kleine Scheidegg où il faut changer de train.

C’est ici que les opérations prennent une autre dimension. Déjà parce que l’on est dominés par l’imposante face glaciaire et rocheuse constituée par trois des sommets majeurs du massif: l’Eiger (3970m), le Mönch (4107m) et la Jungfrau (4158m) (l’Ogre, le Moine et la Jeune Femme pour les non-germanistes… tout un programme).

Ensuite parce-que l’on arrive dans la partie exceptionnelle de l’installation ferroviaire. Il s’agit d’un tunnel, creusé il y a plus de 100ans, qui serpente à l’intérieur de la montagne pour déboucher à 3400m d’altitude. C’est une attraction mondialement renommée, grâce à laquelle on peut facilement accéder à l’univers de la haute-montagne… que ce soit comme simple touriste ou comme skieur/alpiniste.

A plusieurs endroits des fenêtres débouchent vers l’extérieur, notament "dans" l’Eigernordwand (Face nord de l’Eiger).

Le réglement est très strict: nous sommes contrôlés par un encombrant et pittoresque conducteur à l’accent suisse-allemand.

Dès la sortie du tunnel on est dans l’ambiance grandiose des plus gros glaciers d’Europe. Tout au fond on apperçoit Konkordiaplatz, dont nous reparlerons et d’où s’épanche le gigantesque glacier d’Aletsch.

Avant d’attaquer les hôstilités c’est l’heure du pique-nique dont le clou restera cette pastèque, initialement destinée à taquiner un peu Hugues, le meilleur d’entre nous, mais que bibi s’est finalement trimbalée. Heureusement que presque tout le monde en a voulu sinon j’aurais eu l’air fin.

Cette fois c’est parti… avec tout d’abord 200m de de descente sous l’observatoire.

L’objectif initial de cette première journée était la Jungfrau (4158m). Mais rapidement de gros cumulus bourgeonnent et le temps semble tourner à l’orage. Titus craignant le manque de visibilité à la descente décide de changer le programme, nous monterons au Louwihorn (3773m). Pour beaucoup ce n’est pas plus mal, car un 4000 d’entrée de jeu aurait probablement été un moment difficile.

La descente en neige transformée est super dans une pente assez soutenue et un environnement déjà fabuleux.

Ensuite il ne reste plus qu’à se retaper les 400m qui nous séparent à présent de notre premier refuge bien ancré à 3600m d’altitude… dur.

Beau refuge, clean et assez confortable, mais facile d’accès pour les touristes et donc un peu cher.

30/04/07

Départ: Mönchjochhütte ~ 06h30
Arrivée: Finsteraarhornhütte ~ 14h00
Sommet: Gross-Fiescherhorn (4048m) - 11h05

Asc.: 913m @ 240m/h
Dsc.: 1461m @ 740m/h
Tps: 7h14

Au réveil le temps est bien couvert. Pas totalement bouché mais suffisament couvert pour que Titus envisage de changer d’objectif.

(Il est prévu que nous fassions l’ascension du Fiescherhorn d’où nous devons redescendre au refuge du Finsteraarhorn).

Nous commençons par la descente depuis le col qui se trouve au pied du Mönch (Mönchjoch) en suivant la faible pente de l’Ewigschneefäld, l’un des gros glaciers qui se rejoignent à Konkordiaplatz pour former l’Alteschgletscher.

Le temps n’est toujours pas franchement menaçant bien que franchement couvert.

Quelques trouées passagèrent laissent toutefois espoir quant à la visibilité un peu plus haut, Titus décide donc de suivre le plan initial.

Au 2/3 du glacier on attaque donc la montée en direction d’un petit col, le Fieschersättel (3973m).

Tranquille au début, la pente s’accentue franchement au niveau de la rimaye située vers 3800m (on avoisine sans doute les 45°). Skis sur le dos, crampons, et c’est parti.

Au col, malgré quelques percées fugaces du soleil, on est dans le nuage. Mais rien n’empêche de progresser sur l’arrête rocheuse qui mène au sommet… notre premier 4000 de la semaine.

La redescente de cette arrête donnera lieu à une mémorable prise de choux entre les deux moniteurs pyrénéens dont le réservoir d’histoire drôles ne semble pas vouloir s’assécher.

De retour au col, après avoir cassé une petit croute, nous rechaussons les skis. Le début de la descente se fait dans une belle purée de poix. Nous suivons tous Titus, qui semble téléguidé, à la trace.

Heureusement on retrouve la visi un peu plus bas, au moment où le glacier devient capricieux et cahotique. C’est aussi au niveau de cette zone de séracs que la neige devient meilleure.

Puis nous nous laissons glisser sur cette large langue glaciaire jusqu’au pied du refuge.

Surprise: il est impossible de monter à skis comme en 2002. Nous laissons donc le matériel en bas et nous montons à pieds.

De plus nous nous souvenions d’un confort un peu "rustique"… or tout a été reconstruit à neuf, c’est le top à tous les niveaux à présent.

01/05/07

Départ: Finsteraarhornhütte ~ 06h45
Arrivée: Finsteraarhornhütte ~ 15h30
Sommet: Finsteraarhorn (4273m) - 12h53

Asc.: 1378m @ 280m/h
Dsc.: 1302m @ 630m/h
Tps: 8h44

Le ciel est encore bien couvert au réveil à 5h30 mais nous avons espoir car la météo avait annoncé beau aujourd’hui (d’après un guide suisse soit disant bien informé).

Nous décollons donc vers 6h45 avec pour objectif le Finsteraahorn, le point culminant du massif. Après avoir récupéré nos skis laissés la veille en contrebas du refuge, la mise en jambes se fait tranquillement en remontant le long du glacier.

Après environ 35min les choses sérieuses commencent. Nous nous engageons dans un grand couloir, relativement raide… skis sur le dos et crampons… et ça dure sur environ 400m.

Avec quelques rares éclaircies:

Plus haut nous pouvons rechausser les skis, mais la pente est toujours soutenue et la neige dure. Les couteaux sont donc bien utiles.

Vers 3700m nous tirons un peu plus à droite pour prendre pied sur autre glacier, parallèle à celui que nous quittons et qui nous mène à l’épaule du Finsteraahorn (4088m).

  (photo prise le 03/05 depuis le klein grünhorn)

Une partie du groupe n’ira pas plus loin mais tout le monde aura donc fait son 2e "4000" de la semaine.

Pour atteindre le sommet, il faut poursuivre sur l’arrête extrèmement effilée qui apparaît au hasard de quelques éclaircies.

Deux cordées s’engagent: la première menée par Titus avec JC et Jean-François, la seconde par Sergio avec Hughes et votre serviteur.

C’est du terrain mixte par excellence, rocher/neige/glace, et très très aérien.

Il nous faudra 2h environ pour faire l’aller-retour.

Dans ce laps de temps, le mauvais temps semble s’installer. Il neige lorsque nous arrivons au sommet et nous nous ne nous éternisons pas. Personnellement je savoure néanmoins l’instant, le Finsteraarhorn est le sommet le plus élevé que j’ais gravi depuis le Mont-Blanc en 2003 mais aussi tout simplement le 2e de ma "carrière".

En arrivant au col, où nous avions laissé les autres, lorsque la pression se relache, je suis complètement cuit. Il doit être presque 14h00, nous n’avons toujours pas mangé et j’ai une grosse envie de dormir.

Mais ce n’est pas le moment car la descente à ski nous attend, dont une petite centaine de mètres au dessus de 4000. C’est une première pour la plupart d’entre nous.

La petite poudrée qui vient de tomber rend le ski tout à fait agréable et bien plus facile que si nous avions conservé le même terrain qu’à la montée. Même le grand couloir raide est franchi sans encombres par tout le monde… et à après ça le refuge n’est pas loin.

Conclusion: exceptionnelle journée en haute-montagne malgré la météo mitigée qui a contribué a crée une super ambiance.

02/05/07

Départ: Finsteraarhornhütte ~ 05h45
Arrivée: Konkordiahütte ~ 12h30
Sommet: Wyssnollen (3590m) - 08h26

Asc.: 1130m @ 310m/h
Dsc.: 1246m @ 990m/h
Tps: 6h20

Cette fois il fait vraiment mauvais. Tout est franchement bouché et il neigeotte même au moment du départ.

Nous quittons toutefois le refuge du Finsteraarhorn pour traverser l’immense glacier qu’il surplombe: le "Fieschergletscher" sur la rive gauche duquel nous étions restés jusqu’à maintenant.

En raison de la météo notre objectif change légèrement. Nous devions faire un aller retour au "Schönbühlhorn" (3854m) avant de passer le "Grünhornlücke", col qui permet de basculer vers Konkordiaplatz.

Mais le brouillard, le vent et le blizzard font perdre de son intéret à un sommet aussi haut. Titus choisi donc un petit dôme plus facile et moins élevé, le "Wyssnollen", qui a l’avantage de se trouver sur la même ligne de crête et de ne pas nous obliger à trop modifier le plan.

Bien emmitouflés, l’ascension se fait sans problème technique particulier hormis le manque de visibilité… mais tout cela contribue à créer une belle ambiance.

La descente, bien que courte, est très sympas grâce à quelques centimètres de peuf fraichement tombée. D’où nous nous trouvons, nous devrions avoir une vue splendide sur notre course de la veille, c’est domage.

Nous récupérons alors un peu de matos laissé plus bas pour alléger nos sacs puis nous nous dirigeons vers le col à 3280m.

Un peu avant de l’atteindre, une grosse crevasse nous sert de zone d’entrainement aux techniques de mouflage.

Derrière, c’est encore une descente agréable avec un peu de poudre sur une neige plutôt tôlée en dessous.

Nous arrivons à Konkordiaplatz où une petite surprise nous attend:

  Notre refuge se trouve 120m plus haut et il nous faut gravir 455 marches pour le rejoindre !!!

Konkordiaplatz, "la place de la concorde", est une zone d’environ 3km*3km où 4 énormes glaciers convergent pour former le glacier d’Aletsch, le plus gros d’Europe, dont la langue s’écoule sur 27km.

Aujourd’hui l’épaisseur de glace atteint encore près de 1000m à cet endroit. Mais en 1850, lorsque le refuge a été construit, elle était bien plus importante. D’année en année, pour accompagner le retrait, il a fallu rajouter des tronçons d’échelles pour escalader la falaise ainsi mise à jour.

En fin d’après-midi, le ciel se dégage un peu et tout cela devient bien plus explicite:

… il faut s’imaginer ce que représentent 1000m de glace et quel devait être le paysage il y 150ans.

03/05/07

Départ: Konkordiahütte ~ 06h05
Arrivée: Konkordiahütte ~ 13h00
Sommet: Klein-Grünhorn (3913m) - 11h05

Asc.: 1348m @ 300m/h
Dsc.: 1234m @ 1080m/h
Tps: 7h13

Bonne surprise au réveil: le ciel semble s’être complètement dégagé et on peut enfin voir totalement le spectaculaire environnement de Konkordiaplatz.

Par contre, le fond de l’air est frais. Nous commençons à monter face à une forte bise. Avant l’arrivée du soleil il ne doit pas faire plus que -10/-15°C.

Après la descente des échelles et la traversée de Konkordiaplatz, nous progressons le longs des séracs de l’"Ewigschneefäld", le glacier qui descend depuis le Mönchjoch où nous étions le premier soir.

Peu à peu, tous les sommets apparaissent:

Alteschhorn:                      Jungfrau:
 

Plus loin l’Eiger, le Mönch… et encore plus loin le Cervin, le Mont-Rose

Le froid de cette matinée va nous assurer une belle neige à la descente grâce à la petite chute de la veille.

A la rimaye, on chausse les crampons et les plus courageux montent les skis sur le dos pour se taper à la descente le petit couloir, assez raide, qui nous domine. (Hughes, Sergio, Mika, JC et Ludo).

Du sommet on plonge littéralement sur la vallée que nous avons quitté hier et on voit enfin en totalité le Finsteraarhorn ainsi que notre itinéraire.

A 180°, on domine à présent Konkordiaplatz

La descente est tout simplement d’antologie avec environ 1000m de pure poudre que nous sommes les premiers à tracer… le tout dans un paysage dont j’ai déjà tout dit, avec une équipe sympas et "plutôt" au niveau.

Après ça il ne nous reste plus qu’à grimper une nouvelle fois les échelles de Konkordia… pour atteindre la récompense ultime: une bière bien fraîche pour arroser une de ces journées de ski dont on se souvient toute sa vie.

04/05/07

Départ: Konkordiahütte ~ 06h00
Arrivée: Blatten (Gletscherstafel) ~ 12h00
Sommet: Hollandiahütte (3240m) - 10h39

Asc.: 571m @ 180m/h
Dsc.: 1402m @ 1100m/h
Tps: 5h47

Un guide suisse nous avais renseigné avec assurance mais ce n’était malheureusement qu’un météorologue amateur… il devait faire beau encore aujourd’hui…

Titus comptait faire l’ascension de l’Äbeni Flue (3962m) pour aggrémenter "le plat du jour", la longue montée vers le refuge d’Hollandia. Hollandiahütte est situé au niveau d’un col (Lötschenlücke - 3173m), au pied de l’Aletschhorn, tout au fond d’un des vallons qui descend sur Konkordiaplatz et totalement opposé de l’endroit où nous sommes.

Heureusement, malgré 5 jours à plein régime, le réservoir de blagues des "pyrénéens" n’est toujours  pas épuisé, et grâce à cela la montée n’est pas du tout monotone.

Mais plus nous montons, plus le ciel se bouche et plus le vent souffle.

Au moment de bifurquer vers la droite en direction du sommet, Titus propose de s’en tenir là pour aujourd’hui, de consulter la météo et éventuellement de gagner un jour en redescendant directement.

Le refuge est très sympas, appararement confortable, mais les prévisions ne sont pas bonnes: le choix est fait, on s’en va car il vaut mieux descendre maintenant plutôt que demain avec des conditions rendues délicates par d’éventuelles chutes de neige.

Nous avons toutefois la chance d’avoir une petite accalmie au moment de skier les 1400 derniers mètres de la saison:

Jusqu’au bout du glacier:

  (le gris en arrière plan, c’est de la glace)

Puis jusqu’au bout de la neige:

Cette fois le raid est fini et avec lui la saison 2007.